jeudi 1 novembre 2012

Semar



Parmi les personnages du Wayang, le théâtre javanais, Semar est emblématique. Le Wayang raconte les histoires du Mahâbhârata et du Râmâyana, mais le personnage de Semar n'appartient qu'aux versions javanaises et balinaise. Certains disent qu'il serait un vestige des croyances antérieures à l'hindouisme, introduit à Java autour du Vème siècle.
La silhouette de Semar est facilement reconnaissable avec son gros ventre et sa poitrine proéminente, un fessier généreux, une houppette sur la tête et des dents en avant. Ce physique disgracieux est habitée par une belle âme dont les qualités sont vénérées par les javanais. Il joue le rôle du clown mais surtout de conseiller, protecteur du petit peuple, les princes se réfèrent à sa sagesse légendaire.


Dans mes bagages, j'avais emporté ce livre:


J'attendais d'être immergée dans le contexte pour me plonger dans la lecture de ce livre bilingue, espérant améliorer ma connaissance de la langue et de la culture javanaise. Finalement, je m'en suis surtout tenue à la lecture des pages de droite... mais c'est un livre à lire et à relire, peut être un jour pourrais-je me contenter des pages de gauche en indonésien?

De ces pages, j'ai appris le mot "sosok" qui signifie "silhouette", notamment dans ce passage qui vous donnera une idée plus précise du style fantastique et poétique qui fait toute la saveur de ce conte philosophique:

"La nuit se fond dans la fraîcheur des perles de rosée, les poules caquètent doucement. Elle se délave de bleu et se tache de rouge. Dans cet océan de nuit bleutée nagent des poissons en forme de fleur de lotus. De cette silhouette surgit une lame en forme de tige de lotus. L'atmosphère se charge de louanges merveilleuses. Les abeilles bourdonnent, les oiseaux gazouillent, les poissons frétillent, les fleurs ouvrent leurs calices. Sang Hyang Ismayajati (autre nom de Semar, ndlr) apparaît dans tout son être: c'était son âme, la lame-lige-de-lotus. Son corps était resté sur terre, sous l'aspect des Semar de chimère."

Comme les gens du clan des Kurawa dans cette histoire, j'étais à la recherche de Semar, mais il est présenté ici dans toute sa complexité, silhouette  insaisissable et multiple, inattendue, surnaturelle. 

Tenter de résumer ou de synthétiser cette revisite contemporaine du mythe de Semar relève pour moi de l'impossible. Ce conte raconte d'ailleurs les vaines tentatives de chacun pour s'accaparer la puissance bénéfique de Semar, qui chaque fois disparaît, ou se démultiplie en faux-semblants. Je crains d'être frappée de la même malédiction si j'essayais de tracer ici d'un trait ferme et précis les contours de ce personnage.

La lecture de ce livre est un voyage tourné vers la contemplation de la nature célébrant la généreuse beauté de la terre d'origine à laquelle Semar est intimement lié. 


S'il fallait choisir un décors idéal pour entamer ce voyage, ce serait sur les pentes du Mont Ungaran non loin de Semarang, où s'élève un temple très ancien, le Candi Gedong Songo, il y règne une athmosphère mystique de toute éternité.







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